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Petite enfance et analyse de pratique, repères pour intervenir – Livre

Petite enfance réfléxivité

L’analyse de pratique est devenue obligatoire dans les structures d’accueil de la petite enfance. Jusqu’à récemment, les psychologues étaient investis traditionnellement dans cette mission. Depuis 2022, les intervenants peuvent également être des éducateurs de jeunes enfants, des puéricultrices, des psychomotriciens (Article 7 de l’arrêté du 29 juillet 2022). De grands bouleversements donc, qui questionnent. Le portail de l’analyse de la pratique s’en est d’ailleurs fait l’écho récemment (Leturcq, Chimchirian).

Cet accompagnement des équipes est déjà présent dans de nombreuses crèches. Il devient rapidement un outil professionnel précieux lorsque le dispositif est adapté, que la méthodologie est rigoureuse. Les échanges doivent également permettre une réelle réflexivité sur les pratiques.

L’écriture de cet ouvrage s’est imposée à moi, en lien avec ces changements. J’avais écrit plusieurs années auparavant un ouvrage[1] destiné aux équipes et aux gestionnaires afin que l’intérêt de cette démarche soit mieux compris. Aujourd’hui, dans ce livre, je m’adresse aux intervenants qui se lancent dans cette belle aventure.

Un dispositif adapté au contexte de la petite enfance

Il m’a paru important de présenter le contexte de la petite enfance, autant dans sa dimension historique qu’actuelle, dans la diversité des professionnel. Les qui composent les équipes, l’évolution des politiques petite enfance, les courants pédagogiques etc. Il peut expliquer certaines problématiques soulevées lors des séances. Actuellement, le monde de la petite enfance vit une crise profonde. Il n’est pas possible de comprendre les difficultés des professionnelles sans en avoir connaissance.

Une méthodologie rigoureuse

Je propose ensuite quelques bases méthodologiques inspirées des modèles classiques et d’origine (Balint[2], Lévine[3]), adaptés au contexte et aux spécificités de la petite enfance. En particulier, je défends le rôle de l’intervenant comme un animateur des échanges, en évitant une transposition du divan au groupe. En effet, ce modèle laisse parfois les équipes dans de longues périodes de silence, maltraitantes et inefficaces. Un déroulement en plusieurs temps est présenté : récit de la situation problème, questionnement, compréhension. Et, pour terminer recherche de ce qui est modifiable et donc de pistes d’amélioration.

Un cadre sécurisant

Le cadre est aussi abordé dans toutes ces dimensions afin de garantir un travail de qualité, en confiance et en sécurité. Il s’agit de penser l’organisation qui doit être stable. Elle comprend la dimension temporelle qui précise la durée, le nombre de séances annuelles, le moment où elles sont proposées. La dimension spatiale avec le choix (s’il est possible) du lieu est précisée. La composition du groupe est discutée avec en particulier la présence ou non du responsable. Et bien sûr, l’importance des règles de fonctionnement du groupe est abordée avec la confidentialité, le respect de la parole de l’autre et la bienveillance, la participation et l’engagement.

Les compétences de l’intervenant

D’abord une question de posture

C’est une composante essentielle dans le dispositif : écoute, non-jugement, disponibilité psychique en sont les qualités principales. Les intervenants ayant une expérience approfondie du terrain en tant qu’éducateurs ou responsables ont à construire une autre identité en devenant intervenants. Il s’agit d’éviter de se retrouver dans un rôle de prescripteurs de solution. C’est une posture à travailler. Elle permet de vraiment accompagner les équipes dans leur propre réflexion et recherche de modification de leurs pratiques.

Des connaissances théoriques

Des exemples de situations rencontrées en analyse de pratique, sous la forme d’extraits de récits amènent à évoquer les concepts théoriques. Dès lors,Il est nécessaire de les maîtriser afin de donner sens aux situations apportées par les participants. Les situations apportées par les groupes renvoient à l’un des trois piliers du travail : l’enfant, ses parents, l’équipe. Le comportement de certains enfants les interpelle : pleurs, morsures, réactions à la frustration, absence de jeux, retard de langage etc. Les notions autour de l’attachement, les étapes du développement de l’enfant, dans le jeu, la communication et le langage, la genèse des interactions entre enfants, aident d’abord à questionner d’une façon pertinente. Elles doivent être intégrées par l’intervenant afin d’avoir une vision plus globale de l’enfant.

Un animateur des échanges, sollicitant la réflexivité

Ensuite, ces connaissances peuvent éclairer la compréhension que le groupe va construire collectivement. Aussi, la réflexivité est toujours à privilégier. Il s’agit d’éviter l’écueil de l’étude de cas, avec un intervenant « sachant » qui apporte son diagnostic. Et également, se situer trop dans un transfert de savoirs, comme dans la formation, va éloigner le groupe de la réflexion. Pour aborder la relation avec les parents, l’intervenant peut se référer aux notions d’accompagnement à la parentalité, de co-éducation et de participation des parents.

Ces notions font partie des missions des professionnels de la petite enfance. Par ailleurs, la dimension affective de cette relation est à rappeler avec la rivalité qui est souvent sous-jacente. Les problématiques d’équipe se manifestent souvent qui éloignent de la tâche primaire : l’accueil de l’enfant et de sa famille. Elles nécessiteraient un autre dispositif qui est celui de la régulation d’équipe. Mais, il est souvent incontournable de travailler les tensions au sein de l’équipe, avec la hiérarchie et/ou l’institution qui parasitent la réflexion. Écouter les ressentis, comprendre l’origine des conflits, envisager des pistes pour les diminuer permet de revenir à l’accueil des tout petits.

En conclusion

Cet ouvrage ne se veut pas être un guide avec des recettes de fonctionnement. Chaque intervenant se construit sa propre démarche en fonction de son expérience et de sa formation.

Le principe d’une réflexivité partagée entre tous les membres du groupe et avec l’intervenant est le principe fondamental de la démarche que je porte dans cet ouvrage et dans les formations que je coanime. L’intervenant, par sa posture est garant du cadre et animateur des échanges, sans jugement et avec empathie. Ainsi l’analyse de pratique participe à une réelle qualité d’accueil du jeune enfant et de sa famille, plus que jamais au cœur des préoccupations de tous les professionnels.

Marie Paule Thollon Behar – Chronique Sociale 2023


[1] Analyse de la pratique et petite enfance, soutenir la réflexivité des équipes, Chronique Sociale, 2016

[2] Balint M., Le médecin, son malade et la maladie, Petite Bibliothèque Payot, 1975.

[3] Lévine, J. Moll J., JE est un autre, ESF, 2001.

petite enfance, Réflexivité