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Modes de travail en groupe d’analyse des pratiques

Repères et habitudes des professionnels

L’extension des groupes d’analyse de pratiques et supervisions à des institutions et des professionnels qui ne se référaient pas à ce cadre de travail, pose la question des présupposés de ce type de dispositif , de leur perception et des affects des personnes et des groupes qui s’y trouvent prescrits.

Les présupposés

Qu’une institution recoure à de l’analyse de pratiques ou à de la supervision fait référence à ce que j’appelle « présupposé », c’est-à-dire des représentations ou des idées communément admises :

  • une élaboration de réflexion personnelle en groupe, telle que produisant des effets dans le travail groupal et personnel,
  • la perception et la valeur du travail déplacé « du travail bien fait » selon des normes implicites et celles du travail prescrit, à un travail complexe où se mêlent le prescrit, le subjectif, l’intérieur et l’extérieur de l’institution, les relations entre groupes professionnels,
  • les relations quotidiennes au travail, comme objet d’analyse, et plus seulement comme ordinaire du travail.

Nous allons le lire dans cet article. Ces présupposés ne sont pas tenus pour acquis.

Voici l’exemple d’agents administratifs chargés de taches d’exécution contraignantes et sécuritaires, pour lesquels l’institution a ouvert un dispositif de supervision. A l’enclenchement du dispositif, les des perceptions et projections

A l’œuvre on notera :

  • L’expression d’une réticence à participer au dispositif.
  • Le soutien implicite de la hiérarchie directe à cette réticence.
  • Une perception de jugement de l’institution envers le travail produit par les agents. Jugement de dévalorisation s’entend.
  • Une perception persécutive du choix et de la présence d’un psy comme relevant d’un confessionnal dont l’institution aurait l’exploitation bénéfique. Réaction groupale défensive pour contrer ce qui est perçu comme intrusion d’un tiers externe.
  • Des demandes de conditions de travail des agents non satisfaites qui entreraient en opposition avec le dispositif, jugé à son tour, couteux.

La direction du dispositif que je choisis considère le transfert, et non ses objectifs prescrits par l’institution. Ou pour le dire autrement, le praticien a à entendre et travailler les affects, jugements, et réactions défensives, sans s’occuper des objectifs. L’intérêt d’une position transférentielle dans la direction d’un dispositif a pour but de reconnaitre les personnes, d’humaniser le dispositif, alors que les objectifs – abstraits à ce stade et perçus comme jugement et intrusion – n’ont aucun effet. Comme le dit la sagesse populaire « on ne fait pas boire un cheval qui n’a pas soif ».

De mon expérience clinique, c’est-à-dire de groupes différents, de fonctions d’exécution d’un travail prescrit qui exclut à l’ordinaire de penser son travail, de le mettre en jeu collectivement par des différences individuelles, un praticien aura pour but à cette phase inaugurale :

  • D’accepter le transfert négatif comme constitutif d’une institution des positions respectives du groupe et du praticien.
  • De ne rien entreprendre qui puisse modifier les défenses groupales. Le corporatisme des employés fait cadre pour chacun-e à exercer sa fonction dans un cadre contenant.
  • Parler, discuter, prendre part, autrement dit renoncer à une position « classique » de psy ou praticien de l’accompagnement. Les silences, les renvois de question, l’impersonnalisation du praticien ont des effets renforçants des défenses du groupe, et de l’angoisse à la confrontation d’un psy-supposé-savoir.
  • Mettre un cadre à l’écoute des manifestations d’hostilité, de rejet, de méfiance ou d’agressivité. Tout peut être entendu. Ca ne veut pas dire accepté. Faire respecter la valeur du travail des membres du groupe (il se dit « leur travail ne vaut pas grand chose »), et faire respecter la valeur de son travail de praticien. Les groupes qui manifestent de l’agressivité à l’endroit de leur travail et de celui du tiers sont chargés de représentations dégradées, voire humiliées de leur travail.
  • Poser des questions, faire varier les focalisations (là où il y a de la répétition d’objections ou de représentations hostiles), se déplacer dans ces réalités figées, parfois même pétrifiées. Cela ouvre à des positions singulières, des récits vivants, tout en repérant les limites de la singularité, celles qui peuvent être acceptées par le groupe en tant que fonction contenante, voire défensive.

Ce qui se joue pour des professionnels qui n’ont pas les repères de l’analyse des pratiques ou de la supervision, que j’ai appelé les présupposés :

  • Pouvoir – et ce verbe n’est pas usurpé – parler leur travail, le subjectiver, c’est-à-dire y mettre des mots, des affects, de l’analyse de la place que les agents occupent, alors que le discours managérial ordinaire focalise l’injonction, la procédure ou le protocole, les objectifs de résultats.
  • Ouvrir un espace de réflexion en groupe, là où les singularités sont contingentées, ou inhibées dans le temps ordinaire par le corporatisme groupal, son idéal égalitaire et rassurant.
  • S’autoriser, ce qui pour des professionnels assignés à des taches définies comme exécutives, remanie des positions de jouissance-souffrance à de la soumission-rébellion, à ce qu’elles conduisent à de la mortification que d’aucun appelleront « démotivation », ou « burn out » pour les cas de décrochage du travail par la somatisation corporelle, et aussi les ambiances de travail à l’ennui. Oui, des employés peuvent travailler et s’ennuyer, ça n’est pas incompatible.

Un article de Marc LASSEAUXcontact@bymarclasseaux.com

méthodologie, Burnout, supervision, Groupes d'analyse de pratiques, Transfert